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Améliorer la santé mentale au Canada : ce n’est pas une théorie

Peter Coleridge, Chef de la direction national, ACSM

Peter Coleridge, Chef de la direction national, ACSM

Dans son autobiographie non publiée, C. M Hincks, fondateur de l’Association canadienne pour la santé mentale (ACSM), indiqua que « la planification de programmes sans argent est une théorie […] »

Il y a près de 100 ans, C. M Hincks entama la conversation sur les besoins en santé mentale au Canada et depuis, on a beaucoup parlé de la manière d’améliorer la santé mentale des gens et leur accès en temps voulu à des soutiens et services efficaces pour traiter les maladies mentales et lutter contre les dépendances.

Nous avons vu l’adoption de lois, stratégies et plans d’action, non seulement ici au Canada, mais également dans le monde entier, pour améliorer la santé mentale. Cependant, dans la plupart des cas, les lois et plans bien intentionnés ne sont pas soutenus par les ressources nécessaires pour les mettre en application.

Cas typique :

Il y a presque 70 ans : 2 500 délégués du comité international pour l’hygiène mentale (plus tard la Fédération mondiale pour la santé mentale) se réunirent en 1948 et convinrent que le « moment était venu d’élargir le concept de la médecine mentale afin d’y inclure les maladies mentales et leur prévention systématique » et reconnurent que cet effort nécessiterait une collaboration sans précédent.

Il y a 60 ans : la Mental Health Study Act, 1955, fut adoptée par le Congrès des États-Unis. Cette loi était une réflexion audacieuse, sinon singulière, sur le débat mondial d’après-guerre concernant la santé mentale et la maladie mentale dans la société. La même année, une commission royale sur les perspectives économiques du Canada entendait parler de l’importance de « promouvoir et maintenir la santé mentale des employés, si la production devait continuer à un niveau satisfaisant ».

Il y a environ 50 ans : l’ACSM publia en 1963, « More for Mind », qui décrivait un cadre ambitieux pour la réforme de la santé mentale au Canada. Ce rapport était basé sur cinq années de travail réalisées par le comité sur les services psychiatriques au Canada, établi par l’ACSM. Le point principal de toutes les recommandations du rapport était que « la maladie mentale doit être traitée dans le même cadre organisationnel, administratif et professionnel qu’une maladie physique ». On pensait que c’était seulement de cette façon qu’un patient souffrant d’une maladie mentale pouvait recevoir la même excellence en matière de soins médicaux et services de santé auxiliaires, aussi rapidement, facilement et efficacement que le patient souffrant d’une maladie physique.

Cette même année, Action for Mental Health fut publié par une commission mixte établie par une loi du Congrès des États-Unis, et la Community Mental Health Act des États-Unis fut adoptée. Ces importantes mesures législatives marquèrent le début de la fermeture des « asiles d’aliénés » ou hôpitaux psychiatriques, en faveur de la prestation de soins plus proche du domicile.

La grande promesse de la « désinstitutionnalisation » pour la santé mentale communautaire partout en Amérique du Nord était commencée… ou était-ce bien le cas?

Il y a 30 ans : la Commission de la santé mentale du Nouveau-Brunswick reconnut la disparité entre les états de santé physique et mentale, et elle déplaça délibérément des ressources des hôpitaux et établissements de soins actifs afin de répondre aux besoins des gens dans la collectivité. La Loi sur les services à la santé mentale du Nouveau-Brunswick a facilité ce changement et demeure en quelque sorte une anomalie en matière de politique de santé mentale au Canada (elle aborde précisément les disparités en matière de financement).

Il y a environ 20 ans : la Mental Health Parity Act and Addiction Equity Act des États-Unis fut adoptée; toutefois, « l’égalité pour tous en matière de traitement et de possibilités » n’est pas toujours à la portée des personnes qui ont des problèmes de santé mentale et/ou de dépendances. On peut dire la même chose au Canada, où la loi sur les droits de la personne rend illégale la discrimination fondée sur une incapacité physique ou mentale. La discrimination sanctionnée par la loi persiste, malheureusement, sous la forme d’exigences d’admissibilité qui traitent les gens très différemment, selon qu’ils souffrent d’une maladie physique ou mentale.

Au cours des 10 à 15 dernières années : sur une note plus positive, la visibilité de la santé mentale et de la maladie mentale, y compris la toxicomanie, parmi les gouvernements, les entreprises au Canada, les médias et la population ne ressemble en rien à ce que nous avons connu dans toute l’histoire du Canada. Nous avons constaté un profond changement des attitudes et de la conscience de la population à l’égard de la santé mentale et de la maladie mentale. En outre, le Canada a une stratégie en santé mentale, et tous les gouvernements provinciaux disposent maintenant de stratégies ou de plans d’action en matière de santé mentale et de lutte contre les dépendances. Ces plans sont fondés sur les besoins des Canadiens et sur les données probantes concernant ce qui fonctionne, et ils fournissent une feuille de route pour l’amélioration des résultats en santé mentale dans la population canadienne.

Aujourd’hui : il fut un temps où l’adoption de lois, de stratégies ou de plans d’action par les gouvernements offrait de grands espoirs de changement, relativement à l’affectation de ressources pour répondre aux objectifs définis par la Loi. Nous savons, cependant, que les lois et les plans d’action des gouvernements au cours des 70 dernières années et plus n’ont pas produit les mesures pour la santé mentale qui ont été décrites il y a deux générations.

L’avenir : d’autre part, nous savons que les gens — vous et moi — ont été et continuent d’être la seule constante qui crée les mesures nécessaires pour la santé mentale. Les gens sont les garants du changement social. Ce qui était une mosaïque de compassion, d’efforts professionnels et informels visant à fournir des soins de santé mentale aux personnes souffrant de maladie mentale a transformé les conversations en efforts de collaboration, quoiqu’encore modestes. Il est temps que les stratégies en matière de santé mentale et de lutte contre les dépendances comprennent des cibles et suffisamment de ressources, afin qu’elles ne soient plus de simples théories. La Stratégie en matière de santé mentale pour le Canada et le rapport sénatorial de 2007 De l’ombre à la lumière formulent des recommandations précises pour que tous les gouvernements augmentent le financement pour la santé mentale et la maladie mentale au Canada. N’attendons pas un autre siècle pour écrire un chapitre semblable dans cette histoire. Passons à l’action dès maintenant.

Peter Coleridge
Chef de la direction national
ACSM